Expérimentarium de physique

Analyseur de Koenig
L'analyseur du timbre d'un son de l'XP

Les caves de l’Expérimentarium de physique révèlent leurs précieux trésors aux plus courageux. Voici la petite histoire de l’un d’entre eux, exhumé il y a peu. Il s’agit d’un extraordinaire instrument de démonstration de phonétique expérimentale, mêlant fonte de fer, laiton, caoutchouc, verre, noyer et bronze, issu des ateliers de Rudolph Koenig en 1880 à Paris.

Bien avant que les logiciels de téléconférence filtrent l’agitation de nos enfants qui, en distanciel, risquent de perturber nos réunions, il fallut distinguer une parole d’un bruit.

Avant d’être à même d’augmenter les basses qui nous font tant vibrer, il fallut analyser un son complexe, pour distinguer les notes graves des notes plus aiguës.

Décomposition du son Décomposer un son est élémentaire aujourd’hui : il suffit de chanter dans un micro (celui de votre smartphone par exemple) pour voir virevolter l’intensité des différentes fréquences – ou notes – émises à l’écran (via l’App ad hoc).
Votre console préférée sait que vous chantez juste car elle a reconnu votre « la ».





Rudolph Koenig Il était une fois, un certain Rudolph Koenig (1832-1901) qui avait voulu réaliser cette analyse spectrale du son et la rendre visible. Avant l’électronique.

Mère musicienne et père physicien, reproduction oblige, Koenig s’est pris de passion pour la recherche en acoustique expérimentale. Il s’est vu évoluer vers une carrière de fabricant d’instruments s’y rapportant, recueillant les plus grands honneurs lors des fameuses Expositions universelles de Londres en 1862 et de Paris en 1868.







Sphères de von Helmoltz Il collaborait avec Hermann von Helmoltz (1821-1894) dans le cadre de l’étude de la parole et de la perception des sons. Von Helmoltz utilisait de jolies sphères en laiton pour faire résonner les sons (au lieu de souffler dans des bouteilles, comme c’est plus courant dans le folklore local). Tout comme la bouteille presque pleine sonne plus aigu que la bouteille presque vide (car cette dernière offre un volume de résonance plus important), tout comme le violon est plus aigu que le violoncelle, ces jolies sphères résonnaient à différentes notes en fonction de leur taille : plus la sphère est grosse, plus la note qui la fait résonner est grave. En utilisant une collection de ces « résonateurs de Helmoltz », nous avions donc déjà de quoi séparer les différentes notes d’un son complexe.

Mais comment les voir ?

Schéma dispositif Koenig Koenig relia chacun des résonateurs à une capsule manométrique à flamme : du côté connecté au résonateur (D), l’air est mis en vibration lorsqu’un son excite le résonateur à sa fréquence de prédilection. Cet air fait à son tour vibrer une membrane (C), de l’autre côté de laquelle se trouvent une arrivée de gaz (A) et un brûleur (B). La membrane transmet la vibration au gaz, ce qui fait vibrer la flamme qu’il alimente !

Petit souci : si notre oreille est sensible à des vibrations oscillant de 20 à 20 000 fois par seconde, ce sont des fréquences largement supérieures à ce que la persistance rétinienne nous permet de distinguer. Notre œil ne peut percevoir des vibrations aussi rapides de la flamme.

Il fallut par conséquent ajouter un miroir tournant qui jouerait le rôle de stroboscope pour ralentir ce mouvement à nos yeux.

image du son C’est alors que des flammes ont dansé au son de voyelles chantées par Koenig, tandis qu’elles étaient reproduites par des peintres et que les tourneurs de miroirs se gonflaient les biceps sans haltères. Et nous voilà quelques 150 ans plus tard à pourvoir en admirer les images.




Merci Mr Koenig !





 



Maïté Swaelens
Expérimentarium de physique de l'ULB

Mis à jour le 15 avril 2021