Collection d'informatique

Deux ordinateurs Macintosh de la Collection d'informatique
Les ordinateurs "Macintosh SE FDHD" et "Macintosh Plus" de la Collection d'informatique

Macintosh SE FDHD
L'intérieur du "Macintosh SE FDHD"

L’objet du mois, ou plutôt, les objets du mois, sont deux ordinateurs Apple Macintosh.

Faut-il encore présenter « le Mac », qui constitue aujourd’hui une gamme d’ordinateurs très populaires ? Nous allons au moins, avec ces deux pièces de la Collection d'informatique, tenter d’en rappeler les origines. Et pour bien comprendre l’importance de l’Apple Macintosh dans l’histoire de l’informatique, il faut d’abord planter le décor et rappeler le contexte de son apparition.

Comme nous l’avons déjà expliqué dans la description d’un précédent « objet du mois » [1], l’informatique personnelle prend véritablement son envol en 1977 avec l’apparition de trois modèles d’ordinateurs qui auront un véritable succès commercial : le Commodore PET, le Tandy Radio Shack TRS-80 et l’Apple II. D’autres ordinateurs « personnels » étaient disponibles sur le marché dans les années qui ont précédé (comme l’Altair 8800 ou l’Apple I), mais ils étaient très limités et souvent livrés en kit.

En 1977, ces trois nouveaux ordinateurs personnels sont financièrement accessibles au grand public et se présentent comme des espèces de gros claviers que l’on connecte à la télévision en guise d’écran. Malheureusement, ils demandent une certaine maîtrise technique de la part de l’utilisateur, qui interagit à travers des commandes textuelles, entrées au clavier et qu’il faut mémoriser. Les réponses fournies par l’ordinateur sont aussi affichées essentiellement sous forme de texte, souvent sur un écran monochrome, avec des capacités graphiques limitées. Ces caractéristiques frustres sont aussi celles du premier ordinateur personnel introduit par le géant de l’informatique, IBM, qui met sur le marché le modèle 5150 en 1981. Cet ordinateur sera le premier de la lignée des « PC » qui a évolué jusqu’au PC d'aujourd’hui.

Ces premiers ordinateurs personnels sont donc destinés aux amateurs intéressés, prêts à investir du temps dans l’apprentissage de leur maniement – et, notamment, l’apprentissage de la programmation. Ils sont aussi destinés aux petites et moyennes entreprises, qui découvrent les avantages des premiers tableurs, comme VisiCalc pour leur comptabilité. Mais la difficulté d’usage de ces ordinateurs représente un véritable obstacle pour « Monsieur et Madame Tout-le-monde ».

Pourtant, ce problème avait été (partiellement) résolu au début des années 1970 par la firme américaine Xerox. Cette importante multinationale américaine, fondée en 1906, a fait fortune après la Seconde Guerre mondiale en commercialisant des photocopieurs. Ce succès lui a permis de fonder un centre de recherche (le PARC ou Palo Alto Research Center), où d’importantes innovations dans le domaine de l’informatique ont été développées [2]. Parmi elles, on trouve un ordinateur expérimental construit à quelques milliers d’exemplaires, l’Alto [3], qui est, déjà en 1973, le premier à proposer une interface graphique. Grâce à cette interface, on peut interagir avec l’ordinateur en utilisant une souris ; l’information s’affiche dans des fenêtres et on peut utiliser des menus et des boutons pour indiquer à l’ordinateur ce qu’il doit faire.

Steve Jobs, un des célèbres fondateurs d’Apple, visite le centre de recherche PARC en 1979 et comprend immédiatement l’intérêt de cette nouvelle technologie. À cette époque, Apple développe un nouveau modèle : le LISA. Après la visite de Steve Jobs au PARC, c’est décidé : le LISA aura, lui aussi, une interface graphique et une souris. Le LISA est commercialisé en 1983 (il y a quarante ans !) et vise les petites entreprises. Le LISA ne sera pas un succès commercial, mais les concepts et les logiciels de l’interface graphique serviront au développement d’un autre projet, initié en 1979 par Jeff Raskin : le Macintosh !

La première version de l’Apple Macintosh est introduite en 1984 et rencontre un succès commercial considérable. La séance de présentation au grand public, orchestrée par Steve Jobs, est restée célèbre [4] : Jobs entre sur scène avec un grand sac de voyage, en sort un Macintosh qu’il branche et, presque immédiatement, l’ordinateur affiche un message de bienvenue. Cette scène résume bien les objectifs principaux du projet : créer un ordinateur immédiatement utilisable par le plus grand nombre et commercialisé en masse. Afin de rendre l’ordinateur moins intimidant pour ses utilisateurs, il se présente sous forme d’un boitier qui contient l’ordinateur à proprement parler, un petit écran monochrome de 9 pouces et le lecteur de disquettes, le tout équipé d’une poignée de transport. C’est un bel exemple d’intégration pour l’époque, comme on peut le voir sur les photos. Le logiciel fourni est de haute qualité et permet de se mettre au travail immédiatement : il comprend notamment un traitement de texte et un logiciel de dessin. Sur d’autre ordinateurs personnels, ces logiciels doivent souvent être acquis séparément, puis installés, ce qui constitue aussi un frein à l’utilisation de l’ordinateur.

La première version du Macintosh a des caractéristiques techniques qui semblent presque comiques au vu de l’évolution actuelle de la technologie : un microprocesseur Motorola 68000 à 7,8 MHz (environ 500 fois moins que les processeurs actuels) contenant 68.000 transistors (les processeurs actuels en ont plusieurs milliards). Le Macintosh a 128 kilooctets de mémoire vive (environ 60.000 fois moins que les ordinateurs actuels). Il n’a pas de mémoire de stockage permanente (pas de « disque dur »), mais seulement un lecteur de disquettes, lesquelles peuvent, chacune, stocker 400 kilooctets… Aujourd’hui, il en faudrait dix pour stocker une seule photographie de résolution moyenne provenant d’un smartphone !

Sous cette forme « compacte », de nombreux modèles de Macintosh seront commercialisés. La collection informatique en possède plusieurs, dont deux modèles sont illustrés ici – modèles en état de fonctionnement – :

  • le « Macintosh Plus », introduit en 1986, avec 1 mégaoctet de mémoire et des disquettes double face pouvant contenir 800 kilooctets. C’est le premier à pouvoir accueillir un disque dur, externe, de 10 ou 20 mégaoctets (notre modèle en est dépourvu) ;
  • le « Macintosh SE FDHD », datant de 1989 (présenté ouvert sur les photos). Il possède un disque dur interne et, surtout, est le premier à posséder un lecteur capable de lire les disquettes en provenance des PC, ce qui permet d’échanger de l’information entre ces deux types d’ordinateurs.

D’autres modèles suivront : le dernier Macintosh au format compact est le « Color Classic II », qui sera commercialisé jusqu’en 1995. La ligne des Macintosh continue ensuite à évoluer sous d’autres formes, mais avec un logiciel construit autour d’une interface graphique visant une grande facilité d’utilisation. Parallèlement à ces développements, les autres familles d’ordinateur, comme les PC, se sont aussi dotées d’interfaces graphiques (la première version de Microsoft Windows date de 1985). Mais c’est toujours « le Mac » qui reste, aux yeux du public, le modèle qui aura rendu l’ordinateur personnel accessible au plus grand nombre.

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[1] G. Geeraerts, « L’ordinateur « BBC Computer » modèle B+64 (1985) », dans Lettre d’information du Réseau des Musées de l’ULB, n° 22, 2022, p. 13-14.
[2] Notamment en matière de langage de programmation, avec le langage SmallTalk, ou de réseaux, avec le protocole Ethernet
[3] Les curieux peuvent visionner l’excellente série de vidéos documentant la restauration d’un Alto sur la chaîne vidéo YouTube « CuriousMarc » : https://www.youtube.com/playlist?list=PL-_93BVApb58I3ZV67LW3S_JEMFnDrQDj
[4] https://www.youtube.com/watch?v=2B-XwPjn9YY
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Gilles Geeraerts
Collection d'informatique

Mis à jour le 17 février 2023