Musée de minéralogie

Béryl
Fig. 1. Béryl, Bavière, Allemagne - Musée de minéralogie de l’ULB

Béryl aigue-marine Fig. 2. Béryl variété aigue-marine, Montagnes Erongo, Namibie (https://fr.dreamstime.com). La forme prismatique hexagonale est clairement bien visible sur cet agrégat de cristaux. Le changement de couleur au sommet des cristaux est probablement imputable à une augmentation de Fe2+ dans la structure cristalline.

Le béryl est un minéral très connu du grand public à travers les utilisations en joaillerie de certaines de ses variétés, la plus réputée étant l’émeraude.

Il s’agit d’un minéral de formule chimique [Be3Al2Si6018] qui se forme le plus souvent dans un environnement magmatique de fin de cristallisation. De manière générale, un magma cristallise en refroidissant des minéraux dans un ordre particulier, qui dépend notamment des éléments chimiques des minéraux considérés. À titre d’exemple, les minéraux d’origine magmatique contenant du magnésium ou du fer sont très susceptibles de cristalliser tôt, et donc à des températures élevées, au-delà de 1000 °C. À l’inverse, d’autres éléments chimiques « préfèrent » autant que possible rester dans le melt (la phase liquide du magma). C’est le cas des éléments alcalins, comme le sodium ou le potassium, mais aussi des éléments ou molécules volatils (chlore, fluor, eau) ou du silicium, lequel a tendance à se concentrer dans un magma au cours de son refroidissement.

Le béryl va principalement se former dans deux types d’environnement lié au magmatisme :

  • Les pegmatites granitiques, qui sont des roches magmatiques de fin de cristallisation (< 850 °C), majoritairement constituées de quartz, feldspaths alcalins et éventuellement micas, dans lesquelles les cristaux peuvent atteindre plusieurs dizaines de centimètres.
  • Les contacts entre une intrusion magmatique et une roche dite « encaissante ». La très forte différence de température entre le magma et la roche encaissante, initialement froide, favorise l’apparition de fluides issus du magma qui vont percoler à travers la roche encaissante et en modifier la composition minéralogique. Ce phénomène complexe est connu sous le nom de métasomatisme.

Comme tous les silicates, le béryl possède une structure de tétraèdres (SiO44-) qui, dans son cas, se regroupent en cercles de six tétraèdres, entre lesquels se trouvent les atomes d’aluminium et de béryllium. Cette structure confère une symétrie hexagonale aux cristaux de béryl, laquelle s’exprime le plus souvent comme prismes allongés à base hexagonale (Figures 1 & 2). Vitreux et incolore sous sa forme la plus pure, le béryl existe sous de nombreuses variétés, issues d’impuretés causées par la présence de métaux de transition dans sa structure cristalline. Ainsi, des traces de fer sont responsables d’une coloration vert d’eau (Fe2+, Fe3+), jaune (Fe2+, héliodore) et bleu ciel (Fe3+, aigue-marine, Figure 2), le manganèse est responsable d’une coloration rose (Mn2+, morganite) ou rouge (Mn3+), tandis que le vert profond de l’émeraude est dû aux ions Cr3+ et V3+.

Outre son extraction à des fins ornementales, le béryl sert également dans l’industrie, car il est l’un des deux principaux minéraux de béryllium avec la bertrandite [Be4Si207(OH)2]. Son traitement industriel est chimiquement complexe et coûteux en énergie. Le béryllium pur obtenu à la fin de ce processus est un métal résistant, élastique, léger et un très bon conducteur électrique et thermique. Ces propriétés mécaniques en font un métal de choix pour les alliages (avec fer, cuivre, aluminium et nickel, notamment), tandis que la faible densité du béryllium pur est très prisée dans les secteurs aéronautique et aérospatial. En outre, le béryllium est également fort demandé dans les laboratoires de recherche nucléaire.
Les gisements de béryl sont assez bien répandus dans le monde, avec toutefois une concentration de béryl de qualité ornementale en Amérique du Sud (Colombie, Brésil, Argentine) et en Asie (Russie, Pakistan, Sri Lanka). Les principaux pays producteurs à ce jour sont la Russie, les États-Unis et le Brésil.

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Sources :
Emsley, J. Nature’s building blocks: An A-Z guide to the elements. Oxford University Press, 2003
Hazen, R.M., A.Y. Au & L.W. Finger. ‘High-pressure crystal chemistry of beryl and euclase’, American Mineralogist 71, 1986, p. 977-984 (en ligne : http://www.minsocam.org/ammin/AM71/AM71_977.pdf)
Mindat – Beryl. https://www.mindat.org/min-819.html
Webmineral – Beryl Mineral Data. http://webmineral.com/data/Beryl.shtml
Wikipedi – Beryl. https://en.wikipedia.org/wiki/Beryl
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Pierre Buelens
Musée de minéralogie

Mis à jour le 17 mars 2023